Si vous êtes convaincu du bien fondé de la protection de la biodiversité, notamment en tant que potentiel d’évolution et comme « réservoirs de possibles » pour un avenir incertain, ce n’est pas forcément le cas de tout le monde.
Et il faut bien reconnaître qu’il est parfois difficile d’argumenter sur ces questions, tant nous sommes devenus majoritairement des citadins coupés de la nature et que, comme il existe une agriculture « hors sol », nous sommes en voie de devenir une civilisation « hors sol », avec tous les oublis et les schéma mentaux que cela implique.
Jacques Weber, Directeur de l’Institut Français de la Biodiversité, utilise dans les débats publics une argumentation capable de frapper les imaginations et de faire réagir. Elle se déroule en deux phases :
Proposez à vos interlocuteurs de s’imaginer qu’ils partagent un bon repas entre amis. Regardez ce qui se trouve sur la table : du pain, des légumes, des fruits, des pâtes, pourquoi pas un peu de vin ? Y a-t-il un seul des produits que vous consommez quotidiennement qui ne soit issu du vivant ? La réponse est non, bien sûr.
Mais on pourra toujours vous rétorquer qu’il y a des espèces utiles, indispensables à notre survie, et d’autres qui ne le sont pas. Il y aurait même, selon certains, des espèces « nuisibles ». Mais comment faire le tri ? Pouvons nous concevoir une nature entièrement domestiquée, à notre service, ne préservant que les espèces qui nous sont directement bénéfiques ?
Ce serait faire l’impasse sur l’incroyable complexité du vivant et des écosystèmes, dont la dynamique des interactions et le potentiel d’évolution sont seuls garants de leur pérennité.
C’est là qu’intervient la deuxième phase de l’argumentation : Imaginez un jeu de Mikado, formant une sorte de pyramide instable. Chaque bâton coloré représente une espèce vivante, mais vous ne savez pas laquelle. Vous enlevez soigneusement un bâton, les autres ne bougent pas. Adresse ou coup de chance ? A la tentative suivante, patatras ! Toute la pyramide ne s’écroule pas, mais elle en prend un coup …
Maintenant, regardons quelle espèce était figurée par ce petit bâton rayé bleu et jaune qui vient de tomber... Pas de chance : Il s’agissait de l’autoproclamé Homo sapiens !
Moralité : prenons garde lorsque nous enlevons, consciemment ou inconsciemment, un pièce du Mikado. Nous ne savons pas lesquelles seront entraînées dans sa chute.
La Région Île de France a lancé tout un programme pour la sauvegarde de la biodiversité, tout particulièrement en milieu urbain. Il faut savoir que l'IDF est au croisement des 3 influences climatiques, et, ainsi, est au centre d'un corridor naturel. Permettre aux espèces végétales et animales de traverser la zone urbaine est donc un enjeu de 1ère ampleur, et c'est ce à quoi travaille la Région Île de France.
Voir par exemple :
http://www.verts-regionidf.net/article.php3?id_article=181&var_recherche=biodiversit%E9
Rédigé par : franck93700 | 24 novembre 2005 à 16:06
Très juste image, celle du mikado !
Rédigé par : kemi | 24 novembre 2005 à 20:10
Très joli. O'wilson utilise aussi celle du chateau de cartes.
Rédigé par : isabelle | 24 novembre 2005 à 20:50
Eleve de 1ere,je realise un TPE sur la reintroduction et je souhaiterais avoir votre avis sur ce sujet.Etes vous pour ou contre?Qu'en pensez vous par rapport a la biodiversite et l'ecosysteme?
Rédigé par : Paillet Charlotte | 02 décembre 2005 à 09:20
Difficile de répondre rapidement sur une telle question. Je n'ai pas d'objection de principe, bien sûr, et c'est au cas par cas. Quelle espèce ? Pour quel écosystème ? Depuis combien de temps l'espèce en question à t'elle disparu ? Quel sera son impact sur l'écosystème ou elle sera introduite ? L'essentiel, à mes yeux, c'est la dynamique de l'ensemble. Si on réintroduit une espèce pour devoir ensuite en contrôler la population, la nourrir, intervenir sur différents paramètres ... Ce n'est plus une réintroduction, mais un zoo de plein air. Si au contraîre l'espèce permet de restaurer la dynamique de l'écosystème, ça va dans le bon sens.
On peut lancer le débat ici. A vos contributions !
Rédigé par : Emmanuel | 02 décembre 2005 à 14:50
sympa la métaphore du mikado
à reprendre sans hésiter :)
Rédigé par : Dlee | 11 décembre 2005 à 01:31
je reprend:que pensez-vous de la reintroduction des loups?Quand a son impact sur l'ecosysteme,c'est justement ce que je cherche a mesurer!votre avis?
Rédigé par : PAILLET Charlotte | 20 janvier 2006 à 08:54
Bonjour Charlotte,
Petite précision : Le loup n'a pas été réintroduit en France, il est revenu tout seul. La notion de frontière (avec l'Italie) est pour lui assez vague. Certains loups (isolés ?) ont été vu jusque dans les pyrénnées, et il est possible qu'ils aient atteint l'Espagne en passant par la France. En France justement, sur sujet est controversé (voir "Au loup ! sur www.noolithic.com). En Italie, il génère à traver l'écotourisme des revenus supérieur à l'activité pastorale déclinante. Mais la densité de population en France et l'activité économique rurale rendent la cohabitation avec le loup délicate.
Plus généralement, la réintroduction d'un prédateur au sommet de la chaîne alimentaire a souvent des effets impressionants sur l'ensemble de l'écosystèmes. En régulant la population des ruminants, et surtout en modifiant leur comportement, il a favorisé par exemple au Yellowstone la recolonisation des berges par les feuillus, autrefois dévorés par les herbivores alors qu'ils n'étaient que des jeunes pousses. Ce faisant, les paysages ont été modifiés, des habitats se sont créés pour de nombreuses espèces (insectes, oiseaux, poissons, castors, ...) et la biodiversité globale a explosé.
Mais le Yellowstone n'est pas la France. Le loup, comme l'homme, est un peu fainéant et va à la facilité : Si on lui met des moutons sous le museau, il ne va pas s'embêter à chasser du cervidé sauvage ou des lièvres, activité fatigante et au résultat aléatoire, pour se procurer sa nourriture...
Quelques compléments :
http://www.loup.org
http://www.unice.fr/zetetique/travaux/439_loup/loup.html
Rédigé par : Emmanuel | 20 janvier 2006 à 14:03